L'un des mille magnifiques mosquées en Iran! Celui-ci près du désert de Matinabad Eco-Camp (FB)
Matinabad Desert Eco- Camp/اکو کمپ کویری متین آباد
La Terre tourne, les nuages se déplacent, les montagnes observent, les étoiles nous regardent et nous les regardons ... #Iran
6 Mars 2017
Dans le silence du matin, alors que le soleil se lève derrière la montagne, la grand-mère partage avec moi du thé sucré. Elle est belle, son piercing dans le nez, anneau à la verticale avec une jolie pierre verte, et son tatouage sur le menton dans la même verticalité entouré de deux petits points à la base, quelle allure ! Sa tasse finie, elle se prépare pour s'occuper des chèvres, j'aperçois ses cheveux blancs colorés au henné, tout comme le bout de mes doigts. Hier soir, elles ont préparé le mélange à base de feuilles séchées au soleil, cueillies sur l'arbre henné du jardin, elles l'ont appliqué sur mes doigts, laissant une jolie teinte orangée, du verni naturel qui disparaîtra quand mes ongles se seront complètement renouvelés. Le reste de la maisonnée se réveille, la grand-mère a déjà allumé un petit feu dehors, il fait frais dit-elle; mais est-ce les restes d'une habitude ancienne, au temps où il fallait allumer le feu le matin pour faire bouillir le lait ? Chacun attrape deux chevreaux et les aide à téter, deux mamelles par petit, pas plus, tout est sous contrôle afin qu'il reste assez de lait pour le petit déjeuner : un verre de lait par personne. Il n'y a pas si longtemps, les repas des omanais étaient constitués de lait de chèvre ou chamelle, de dattes, de poissons et parfois de viande de gazelles ou d'oiseaux qu'ils chassaient. Il fallait rejoindre Salalah, à 100km d'ici, à pied ou avec les ânes et les chameaux pour s'approvisionner en sucre, thé et riz. Ils buvaient l'eau légèrement salée d'une nappe phréatique (aujourd'hui non potable dû à la pollution). Un soir, le père de famille nous raconte qu'il a grandi dans une grotte non loin d'ici jusqu'à ses 15 ans, je le regarde les yeux écarquillés, il a seulement 49 ans ! En 34 ans ce pays a été complètement transformé. La journée, à bord d'un de leur énorme 4x4 nous allons voir la grotte, la magnifique plage et l'oasis où s'abreuvent les animaux, en route nous surprenons de jolies gazelles. Mazin et son frère Salem qui ont 27 et 23 ans nous disent que la vie était dure à l'époque, aujourd'hui avec le pétrole tout est plus facile, plus accessible. Le soir, Marco demande au père si la vie était plus difficile autrefois. Il répond qu'aujourd'hui il a trois bateaux avec des pêcheurs indiens qui bossent pour lui, une usine de conditionnement de poissons, des camions frigorifiques pour vendre le poisson à Dubaï, il bosse comme un fou ; il y a de moins en moins de poisson dans leur mer et le cours international du poisson est bas, il a donc commencé un nouveau business, il loue des machines pour la construction des routes qui sont en plein développement en Oman. Tout ça en plus de leur troupeau d'une centaine de chèvre ! Mais il faut bien qu'il gagne de l'argent aujourd'hui pour payer la moderne maison en ciment, la facture exorbitante d'électricité pour alimenter l'air conditionnée, les différentes voitures et l'essence, les personnes qui bossent pour lui.... Alors non la vie n'était pas plus difficile autrefois, elle n'était pas facile non plus, elle était simple dit-il, ils avaient le temps et ils n'étaient pas tourmentés. J'envie encore aujourd'hui mes aïeux nomades, qui parcouraient le désert avec leur troupeau et leurs dromadaires. Gens évanescents, de partout et de nulle part, ils arpentaient, de leur pied souple, le sol pierreux ou les dunes de sable. Ils allaient surgissant ou s'évanouissant derrière les vastes horizons de ce gouffre horizontal que représente le grand désert. La frugalité qu'impose leur mode d'existence faisait d'eux des êtres libres. Transporter du superflu condamne à une pesanteur incompatible avec une itinérance incessante sur des espaces infinis. Me revient également l'image de ma grand-mère transformant, par je ne sais quelle magie, en festin les plantes du désert, quelques poignées de céréales et le peu de lait que lui donnaient deux chèvres graciles. La demeure n'est q'une toile vite édifiée sous la voûte céleste, selon les impératifs pastoraux. Tout est simple. Ce sont les mots de Pierre Rabhi qui ont fait remonter en moi les souvenirs des moments passés avec la famille de Mazin. Cette famille vivant avec des accessoires de la modernité mais qui garde les habitudes d'un passé pas encore trop lointain. Cette homme qui s'acharne au travail et a de multiple business mais qui aujourd'hui fait le bilan et ce demande « pourquoi tout ça ? » Tiphaine 6 Mars 2017 Ça bouchonne sur le pont Sheikh Khalifa. Je termine un petit-déjeuner pain français, beurre de cacahuète américain et confiture allemande. A une altitude de 13 étages, je me plonge dans « la sobriété heureuse » de Pierre Rabhi, en face de moi des milliers de personnes tentent de pénétrer la capitale des Emirats en ce dimanche matin, début de la semaine de travail. Au même moment, j'imagine que Mazin et sa famille son en train de traire les chèvres et s'apprêtent à prendre leur petit-déjeuner : un grand verre de lait bouilli chacun, personne n'aura faim avant 13h. Ici la cuisine est pleine de tentations « industrielles » venues du monde entier, et mon estomac réclame déjà : encore, encore! Nous sommes à Abu Dhabi dans l'attente de notre visa iranien, mes pensées me portent dans un petit village omanais de la région du Dhofar. Le 24 janvier dernier nous mettions pied à terre au Sultanat d'Oman, nous réalisions ce qui nous avait plusieurs fois été dis « impossible, vous ne trouverez pas de bateau », traverser l'Océan Indien en bateau à voile avec nos petits vélos. Nous ne connaissions rien de l'Oman, il n'y a pas longtemps nous en ignorions même l'existence. Nous limitons nos recherches avant d'arriver dans un nouveau pays, évitons de regarder des photos, nous ne voulons avoir aucune idée préconçue, aucune attente, c'est ainsi que nous aimons découvrir le monde, la page Oman est presque vierge dans notre tête. Quelqu'un nous a seulement dit : « vue de google map, il n'y a rien à part quelques villages, ça à l'air complètement aride, pas grand chose à faire ». Nos vélos sont prêts, nous prévoyons beaucoup d'eau, beaucoup de nourriture, nous ne savons pas bien ce qui nous attend. A peine quitté la ville de Salalah et ces grandes palmerais, nous pédalons au milieu de la steppe bordée par la mer d'un côté et la chaîne de montagne du Dhofar de l'autre, et retrouvons nos compagnons de ces régions arides : les dromadaires et les chameaux. Des chauffeurs enturbannés s'arrêtent à tour de rôle à notre hauteur, et nous tendent des bouteilles d'eau fraîche, bientôt je ne sais plus où les stocker et mon vélo commence à être en surpoids ! Un jour, une camionnette frigo s'arrête au-devant, un monsieur élégant en descend dans son grand vêtement blanc, alors que nous approchons, Marco rêve déjà « c'est peut-être des glaces cette fois !? ». Mazin nous tend des jus de fruits bien frais, et alors qu'il s'apprête à repartir, il nous dit « J'habite à 3 km d'ici si vous voulez vous reposer, déjeuner et faire une sieste avant de reprendre la route ». Le village est dans une jolie petite vallée au milieu des montagnes aux roches ocres, rouges, et aux chemins de sable où nos roues zigzagues jusqu'à la grande maison de la famille de Mazin. Nous sommes accueillis dans la pièce des invités, des grands tapis sont étendus au sol et des coussins volumineux sont disposés le long des murs. Il nous apporte un plateau de riz et du poisson, puis ils nous laissent seuls. Nos muscles fatigués par cette reprise, après 4 mois sur le bateau à voile, nous invitent à la sieste. J'ouvre un œil, il est 16h! Zut, il est temps de repartir ! J'ouvre timidement la porte, dehors sur la terrasse il y a du monde rassemblé à boire le thé ; ils m'aperçoivent. Il est trop tard pour repartir maintenant, ils m'invitent à prendre une douche et me joindre à eux ; un peu gêné, Mazin me demande si je veux bien revêtir les vêtements traditionnels. Au sorti de la salle de bain, Abeer, une des sœurs et sa Maman m'attendent, en une seconde me voilà correctement vêtue pour rejoindre le cercle familiale. Nous dégustons du pain sucré tout chaud et du thé avec les grand-parents, les parents et les 9 frères et sœurs de notre hôte, Marco nous rejoint, lui aussi se retrouve vêtu à l'omanaise : dishdasha et massar (grand vêtement blanc et turban). J'ai l'impression d'avoir voyagé dans le temps, nous sommes ailleurs... ces scènes sont magiques, ce sont ces moments-là qui me font continuer à voyager. Tiphaine |
AuteursMarco + Tiphaine: VideonewsletterSUIVES NOUS SUR
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