Rapidement, je réalise qu'il ne s'agit pas d'un rêve, tout est extrèment réel : je suis à terre sur des rochers ! “J'ai activé le SOS du Spot” me dit Tiphaine. “Quoi? Mais tu es folle ? Annule-le tout de suite, maintenant je me lève, tout va bien”, mais je ne me rends absolument pas compte de la situation. Je ne voie pas la scène de l'extérieur. J'ai une grande et profonde plaie à la tête qui saigne à flot et qui nécessite plus qu'un simple pensement, je ne peux pas bouger tout mon côté gauche et la nuit tombe ! Leiset, immédiatement, est partie chercher une voiture. Tiph parle à Paul en français et lui, très calme, lui demande à chaque fois de répéter en anglais. Elle ne se rappelle plus où est chaque chose, elle est en panique totale, elle ne supporte pas la vue du sang. Je commence à trembler, mais néanmoins je me sens comme un pilote à l'intérieur d'un véhicule en panne, je suis lucide et je dirige les opérations depuis la terre : « Tiph prend la couverture de survi, elle est dans ta sacoche avant gauche ! Et aussi les mèches pour les blessures profondes que ton père nous a montré ». Les ciseaux à la main, ils me coupent quelques cheveux pour pouvoir appliquer quelques chose de momentanée afin que le sang arrête de couler. «Hé les copains, s'il vous plaît ne couper pas trop, j'ai mis beaucoup de temps pour les avoir longs comme ça », je vais bien, je n'ai pas perdu mon sens de l'humour ! Trois gros hommes sont arrivés avec leur véhicule, ils hurlent croyant mieux se faire comprendre, mais je ne suis pas sourd, seulement nous ne parlons pas la même langue. Maintenant il me reste qu'à atteindre la voiture. Ils veulent me porter sur la bâche : « Halte, halte là.. » leur dis-je, je voudrai éviter de tomber une seconde fois. J'essaye de me lever lentement, avec la main qui fonctionne encore je m'aggripe à un robuste bras tadjik, l'un d'eux me pousse dans le dos, un autre me tient sur le côté, j'arrive à m'allonger dans la jeep. « Paul, Leiset, s'il vous plaît, pourrez-vous mettre nos vélos au village précédent, nous ne savons pas pour combien de temps nous en avons, nous reviendrons les chercher dés que possible ». Les 18km de route prennent la direction de Sagirdasht, un village à 2500m d'altitude entre les montagnes, apparement là-bas il y a un petit hôpital. Nous arrivons, ils m'accompagnent dans une salle, le matériel est vraiment rudimentaire, un instant j'ai cru qu'ils allaient faire bouillir de l'eau pour stéréliser les aiguilles. Mais juste avant de poser ma tête sur le lit j'apperçois du matériel médicale encore emballé...je ferme les yeux un peu plus tranquille. Trois beaux points de souture, une bande autour de la tête pour tenir la compresse et me voilà l'air d'un blessé de guerre d'une autre époque. Maintenant il faudrait faire une radiographie pour comprendre ce que j'ai à l'épaule. La machine date d'une autre époque et à la troisième tentative l'image n'est toujours pas nette, mais les docteurs me palpent et m'annoncent que ce n'est rien de grave, peut-être une micro-fracture. Ils nous ouvrent une chambre, des planches de bois avec quatre pieds font office de lit. Mon corps est exténué, je m'écroule de fatigue.
Akbar, le chirurgien, a 28 ans et il porte toujours une casquette bleue, même lorsqu'il opère. C'est le plus éveillé de tous et bien qu'il ne parle pas un mot d'anglais il trouve toujour un moyen de se faire comprendre. Aujourd'hui il a décidé de me faire une heure de leçon de tadjik et russe. Il pointe un objet dans la chambre et me le nome dans sa langue, puis en russe, je prends note puis je le lui traduis en anglais. Ce petit jeu est sympathique, mais à un moment donné il m'appuit fort sur l'épaule où j'ai mal. J'hurle et le regarde me demandant s'il n'est pas devenu fou. Je n'ai pas le temps de réagir qu'avec un sourire à 32 dents il me dit : “voilà, cela se dit : dard(douleur)”... il me vient à l'esprit presque instinctivement de lui retourner une belle baffe et de dire : “voilà cela s'appelle : “une baffe”, mais la scène est tellement improbable que je commence à rire moi aussi conscient que justement grâce à ces méthodes peu habituelles, je n'oublierai plus jamais ce mot : dard ! Ici les docteurs ont tous un second travail, il suffit juste d'observer leurs énormes et épaisses mains de paysans/maçons pour deviner lequel. Même Akbar un après-midi revient avec le visage plein de peinture blanche.
Marco